Des tirages oscillant entre le photomaton de collégien et le selfie avaient été collés sur le sol de la place. Une petite pluie a délavé leur fin papier jusqu’à déformer et altérer les visages, parfois aidée dans son ouvrage par quelques piétons pressés. Certains visages se sont partiellement effacés, d’autres se sont déchirés, ont éclaté, sont devenus méconnaissables. Les regards qui faisaient des singeries pour se donner une contenance devant l’appareil photo sont devenus pensifs, étonnés, interrogateurs, paniqués, angoissés. Une cour des miracles aux acteurs cousins des peintures de Francis Bacon s’est constituée. Ils sont devenus expressions de la nature humaine dans sa violence, renvoyant à l’être profond autant qu’à nos peurs abyssales personnelles ou sociétales grâce à une simple pluie.