On oppose la réalité et la fiction comme le vrai et le faux. La réalité serait ce qui est, la fiction de la rêverie, de l’insouciance ou de la fuite hors du réel. On retrouve ici en filigrane le dénigrement rationnel produit par l’occident iconoclaste à l’égard des mythes, filiation qui n’a rien de surprenant puisque le mythe est une fiction.
Claude Levi-Strauss a montré que les mythes qui régissent les civilisations sont des systèmes logiques complexes amenant une solution à des problèmes insolubles pour les logiques du tiers exclu. La fiction conserve encore aujourd’hui cette puissance. C’est pourquoi son principe perdure. Sinon, à quoi bon se raconter des histoires ?
Certes, toutes les fictions n’ont pas la force ni la valeur du mythe. Mais elles conservent le caractère d’un système qui vient au secours de la compréhension d’une réalité. Elles ne s’opposent pas à elle, mais y sont directement branchées. A son tour, la création photographique est une fiction. Une création d’autant plus originale qu’en passant par la représentation, elle emprunte des voies autres que celles privilégiées par l’écriture et la raison.